✎ Barcelone, Espagne. C'est là que je suis née, il y a vingt-et-un ans. Dans une grande villa décorée comme dans les films, mon père était un homme d'affaire, ma mère australienne qui restait à la maison avec moi. Je ne voyais pas souvent mon père, mais ça ne m'empêchait pas d'y être attaché quand même. J'étais une petite blonde aux yeux verts, et espagnole. Des contradictions. Physiquement je ressemblais à maman. C'est ce que je me faisais dire du moins. J'étais seule dans une grande maison avec ma mère et les bonnes, je me sentais parfois seule, j'étais dans un monde de grandes personnes, haute comme trois pommes à essayer de comprendre de quoi ils parlaient. Je m'amusais à dessiner où je passais des heures dans ma grande chambre rose à me demander ce que ça pouvait être d'être avec d'autres gens de mon âge. À l'école je n'étais pas celle qui prenait sa place, je n'étais pas habitué d'être avec des enfants de mon âge. Je ne savais pas trop comment m'y prendre. Je n'étais pas celle dont tout le monde parle, encore moins celle qui parle de tout le monde, je restais un peu dans mon coin, et faisait ce que j'avais à faire, je n'avais pas confiance voilà. J'avais mes amis quand même, que j'invitais chez moi, sauf que moi ma maison était parfois deux fois la leur et que j'avais peut-être l'impression de n'être apprécié que pour ça. Depuis que j'étais née j'avais la forte impression que mes parents m'avaient un peu caché du monde et que maintenant j'en était désavantagée parce que je ne savais pas comment me débrouiller toute seule. "Riche et idiote" c'est le genre de chose que je pouvais entendre lorsque je marchais dans les couloirs. Il y a une chose que j'adorais faire, c'est écrire, j'écrivais des textes, des lettres, je pouvais griffonner sur un bout de papier. La petite vie rêvée, la grande maison, les amis car en vieillissant je suis devenu de ceux qu'on dit populaire si je peux dire ça, en faite, aux yeux de tous j'étais la petite barbie qui avait tout pour avoir la vie parfaite. "La petite blonde" ou encore "Cendrillon" je ne ressemblais en rien à une espagnole, ce fut peut-être la seule chose pour laquelle je me suis démarquée. J'étais dans la masse comme tout le monde et malgré tout ça me plaisait d'être comme ça.

✎ J'avais quinze ans, j'avais quinze ans lorsque ma mère est partie. Sans un mot où une lettre rien, elle m'a laissé abandonnée à moi-même forçant mon père a revenir dans ma vie. Je n'étais pas très proche de lui, c'était silencieux à la maison alors que je me demandais pourquoi elle m'avait fait une telle chose. J'avais l'impression de ne pas compter pour personne maintenant, de me retrouver toute seule. Mon père faisait de son mieux pour essayer de m'élever, il se débrouillait comme il le pouvait, je ne pouvais pas vraiment m'en plaindre, il faisait des efforts, même si ce n'était pas toujours bien placé. En grandissant j'avais appris à m'affirmer plus qu'avant, j'étais capable de tenir mon point, je n'étais plus juste la petite blondinette, j'avais pris un peu confiance et je pense que ça se voyait. Au moins pour moi ça rendait les choses plus faciles. Même si parfois je me sentais un peu comme intru dans tout ça, je n'étais pas aussi sociable qu'eux. Je me fondais à la masse essayant de trouver ma place, c'est là que je réalisais la chance d'avoir des amis aussi géniaux qui étaient là pour me soutenir et être là pour moi. Je n'avais pas l'habitude. Mais je savais que je pourrais toujours compté sur eux malgré tout, eux ne me jugerait jamais et me laisserais encore moins tombé. Au moins là, on peu dire que j'étais bien.

✎ Deux ans, deux ans depuis que ma mère était partie et le pire n'était pas encore là. Mon père a dû abandonner sa compagnie, mais on a pas eu à déménager, pas pour ce moment du moins. Nous étions devenu plus proches, j'avais dix-sept ans, chez moi ça devenait un peu plus lourd par moment, surtout quand mon père abordait le sujet de maman. Je ne savais pas vraiment si je voulais encore en parler, il aurait pu me raconter n'importe quoi, mais je ne voulais pas l'entendre. Ce n'était pas ce dont quoi j'avais envie de parler. Je m'étais renfermée, je ne savais pas comment l'expliquer, mais je sentais que quelque n'allait pas. Je ne savais pas si c'était moi mais quelque chose allait venir tout détruire. Après tout ce temps de froid, mon père a fini par me donner la raison du départ de ma mère, dans une lettre. Des mots comme "j'ai fais une erreur" "je ne te voulais pas" "j'en ai eu marre de toi" oui, c'était bien les mots que sa mère avait utilisé pour me décrire. Une erreur de parcours, quelque chose qu'elle aurait préférer ignorer. J'étais détruite, comme si j'avais été poignardée. Je ne pouvais même pas parlée, j'étais anéantie. Je me sentais abandonné à moi-même et complètement perdue. Comment j'aurais pu réagir, faire comme si ça ne m'avait pas atteint, et continuer, sûrement, mais ça n'aurait pas été moi que de réagir comme ça.

✎ Quelques semaines avaient passées, et je sentais que tout le monde étaient inquiet pour moi. Je ne pouvais même pas parler, j'étais froide et distante, incapable d'être honnête avec eux et ça à éclater. La rumeur sur moi circulait, la lettre, j'entendais parlé de ce que je savais déjà partout autour de moi. Des regards de pitié ou de dégout me traversaient à chaque instant. Et personne pour m'aider car tout simplement je me laissais tomber toute seule dans ce mal. J'ai fini par complètement me séparer du monde et rester toute seule. Ma meilleure amie est restée tout le monde d'autre a simplement abandonné sans savoir, je ne peux pas leur en vouloir non plus. Je ne savais pas quoi faire pour que toute cette histoire ne m'atteigne plus. Je ne savais plus où donner de la tête, je n'avais pas l'impression d'avoir ma place là. Je n'avais pas été voulu et après ça je me disais que je ne trouverais pas ma place avec tout le monde. Des années plus tard, je me retrouve encore prise avec ce sentiment de solitude et encore aujourd'hui il y a des moments où je voudrais ne pas être là.